Bruxelles compte plus de 5000 personnes sans-abri et mal logées, c’est-à-dire en hébergement précaire ou d’urgence. Plus de 700 d’entre elles dorment effectivement en rue. Ces chiffres sont tirés d’une enquête de la Fondation Roi Baudouin. Heureusement, il y a quand même de l’aide, comme les Infirmiers de rue. Pourtant, ces travailleurs humanitaires sont souvent oubliés. Qu’est-ce qui les anime et comment travaillent-ils?
Clémence Théot a fait ses études en France et a obtenu une maîtrise en travail social et en gestion des crises humanitaires. “Il n’y a pas de cours particuliers sur le sans-abrisme, c’est l’expérience professionnelle et l’engagement qui jouent”, dit-elle. Clémence supervise tous les infirmiers de rue et est responsable du bon fonctionnement de l’organisation. Avant cela, elle a travaillé dans le domaine en tant qu’infirmière de rue pendant 4 ans.
Il n’y a pas de cours particuliers sur le sans-abrisme, c’est l’expérience professionnelle et l’engagement qui jouent.”
Clémence Théot
Tout d’abord, Clémence et ses collègues souhaitent clarifier la différence entre le travail d’une infirmière de rue et celui d’un hôpital. “Notre système de gestion conjointe est un grand avantage par rapport à la hiérarchie verticale d’un hôpital. Tout le monde a des spécialités similaires, ce qui nous permet d’interagir facilement. Deuxièmement, il s’agit de la quête de sens du patient et pas seulement de sa condition médicale, ce qui n’est pas le cas dans un hôpital. Et la raison principale est qu’il y a un suivi à long terme des patients, nous finissons par les connaître très bien et construire un lien fort. Dans un hôpital, cela n’est pas possible en raison du flux continu de nouveaux patients.”
J’ai lu dans les médias qu’un adulte sans-abri sur cinq a moins de 26 ans. Clémence trouve ce chiffre très inquiétant, mais en même temps, elle reconnaît que cela reflète les problèmes auxquels ils doivent faire face. Cependant, ce n’est pas leur public. “Nous travaillons avec des patients qui ont passé plus de vingt ans dans la rue, ils ont généralement entre 45 et 80 ans.”
Agir sur la route
Quinze minutes avant le départ, les infirmiers se réunissent pour discuter des informations importantes concernant les patients de la veille. Ils décideront également qui doit effectuer chaque parcours. Ensuite, ils préparent leur sac. “Nous emportons toujours le matériel de soins avec nous. Il s’agit d’un équipement très simple qui nous permet de prendre les paramètres de base: glycémie, pression sanguine, saturation, température. Notre équipement est très limité car nous essayons d’éviter au maximum de fournir des soins dans la rue. Ce n’est pas hygiénique.”
Notre équipement est très limité car nous essayons d’éviter au maximum de fournir des soins dans la rue.”
Clémence Théot
Bien sûr, ils possèdent aussi des choses à donner comme des sous-vêtements, des chaussettes, des bonnets, une brosse à dents, etc. Ils disposent également d’un téléphone, ce qui leur permet d’être toujours en contact avec leurs collègues ou d’alerter les services d’urgence. “Nous en avons déjà eu besoin pour les urgences, par exemple lorsqu’un patient se sent mal ou souffre d’hypothermie.”
En outre, ils font des activités avec leurs patients. “Nous invitons parfois nos patients à boire un café. De cette façon, nous essayons de faciliter la création de liens avec eux et de parler ouvertement de questions complexes. Il peut comprendre aussi des activités comme acheter de nouveaux vêtements et, si c’est l’anniversaire d’un patient, nous l’invitons généralement à dîner.”
Les patients reconnaissants ou agressifs?
Par expérience, Clémence affirme qu’une relation de confiance peut être établie lorsqu’ils connaissent les qualités et les valeurs du patient. “Chaque personne est différente, mais la plupart sont reconnaissantes. Le stress de la rue affecte leur état d’esprit. En conséquence, ils peuvent se comporter de manière agressive ou distante. Puis je pense au fait que nous sommes tous humains, que nous avons nos humeurs ou nos problèmes. C’est pourquoi il est important de continuer à revenir et de ne pas laisser la personne dans la solitude”
Si nous pouvons reloger tout le monde, il n’y aura pas de morts à la fin
Clémence Théot.”
De temps en temps, il y a des situations étonnantes dont les infirmiers tirent satisfaction. “Il y a quelques années, nous avons réussi à reloger un homme qui était sans-abri depuis plus de 24 ans et qui passait sa vie à camper près de la Gare du Nord. Quand il est entré dans une maison de repos, il était méconnaissable. Il a commencé à se doucher, à se raser, à se couper les cheveux,… C’était impressionnant, personne n’aurait jamais pensé qu’il changerait de vie. Il est la preuve que si nous pouvons reloger tout le monde, il n’y aura pas de morts à la fin.”
En bref, les infirmiers de rue sont incroyables et constituent un grand soutien pour les sans-abri. Cette organisation médico-sociale n’est pas comparable à la fonction hospitalière. Elle se concentre principalement sur le spirituel et sur la relation de confiance entre le patient et l’infirmier de rue. Ils garantissent que les sans-abri ne se sentent pas seuls et se concentrent sur le suivi à long terme des patients. Soyons clairs: il s’agit d’un travail intensif mais très gratifiant!